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, où l'on découvre quelques éléments du document en question
Voici donc ce que l'on peut y trouver :
LES MIGRATIONS DES CANARDS
et inductions à en tirer sur la mer libre du pôle Nord
Par m. Gabrel ROGERON.
Les migrations des Canards vers le sud sont de deux
sortes. Les migrations régulières à époque fixe, à la fin de
l'automne, et les migrations irrégulières à époques indéterminées, dans le courant de l'Hiver.
Les premières, les migrations régulières à époque fixe, ont
lieu vers la fin d'octobre, ne variant que de peu de jours
chaque année et ne tenant aucun compte de la température
douce ou froide, mais seulement, d'ordinaire, de la direction
du vent. Ces premières migrations semblent être absolument
de long cours, par longues traites et s'étendre de l'extrême
nord au centre du continent africain. Les canards qui en font
partie passent rapidement et s'arrêtent peu. Aussi font-ils
souvent le désespoir des chasseurs qui connaissent bien ces
sortes de canards et qui ne peuvent le plus souvent parvenir
à les faire descendre, malgré toutes les séductions de leurs
apjyelants.
Quelquefois, blottis dans leur hutte, ils entendent à cette
époque les sifflements des ailes de ces nombreux voyageurs
une nuit entière sans pouvoir tirer un seul coup de fusil ; bien
que ces malheureux oiseaux s'arrêtent trop encore, comme
l'attestent les multitudes de leurs cadavres que leurs bandes
sèment sur leur route, lesquels viennent grossir nos marchés
sur leur long itinéraire. Et il m'est arrivé de revenir d'un
voyage d'Italie à cette époque ; d'un bout à l'autre de la péninsule, depuis Naples jusqu'à Gênes, les étalages des marchands de gibier regorgeaient de ces oiseaux.
Les Canards sauvages proprement dits, les cols verts {Anas Bosclias) faisant partie de ces passages réguliers, sont aussi d'une race plus pure, plus fine ; le coloris de leur plumage
est également d'un plus vif éclat, preuve qu'ils viennent de
régions inhabitées où leur espèce n'a pu être en contact avec
notre race domestique.
Ces migrations régulières, que rien n'explique puisqu'elles
semblent se produire sans motif apparent, alors que ni le
froid ni le manque de nourriture à cette époque ne sont en
cause, pour lesquelles on ne peut pas même alléguer, comme
chez certains oiseaux de passage, l'instinct migrateur de la
race, car une partie d'entre eux n'émigre pas alors des contrées du nord comme on va voir tout à l'heure, ces migrations régulières d'automne, dis-je, ne seraient-elles pas
causées par les nuits des contrées polaires que ces oiseaux
habiteraient ?
On présume, en effet, que sous l'influence des courants
d'eau chaude sous-marins, du gulf-stream, il existe une mer
libre au pôle baignant des pays tempérés, des continents et
des lieux couverts de végétation. De hardis voyageurs, l'Américain Kane et ses compagnons en 1834, ont même prétendu
l'avoir découverte. Après avoir traversé d'immenses déserts
de glace, ils auraient trouvé cette mer libre peuplée d'une
innombrable multitude d'oiseaux d'eau, Mouettes, Canards,
Oies sauvages, etc.
Mais, néanmoins, quand même les rigueurs du froid ne se
feraient jamais sentir dans ces régions polaires, (qu'on y
jouirait toujours de la plus agréable température, les longues
nuits qui les enveloppent pour plusieurs mois, sont à elles
seules un obstacle insurmontable au séjour continuel de ces
oiseaux. Il leur faudrait, à un moment donné, fuir ces ténèbres menaçant de les envahir, et émigrer du côté du jour et
du sud, comme ils le feraient sous l'impulsion du froid. Aussi,
ces grandes migrations régulières des canards ont-elles lieu
vers la fin d'octobre et le commencement de Mars pour le
retour, époque coïncidant précisément avec celle où commence et finit la nuit polaire.
Les autres migrations de canards sont, au contraire, irrégulières, parce qu'elles coïncident avec les froids dont elles
sont la conséquence. Quand les bulletins météorologiques
annoncent une forte baisse de température dans le nord de
l'Europe, on peut s'attendre à voir apparaître ces dernières, et d'autant plus nombreuses que la zone de froid est plus
étendue et surtout que celui-ci est plus intense. Car tous ne
partent pas ensemble ; beaucoup ne déménagent qu'à la dernière extrémité, et quand les cours d'eau qui se glacent ordinairement plus tard que les étangs et marais, sont également
pris. De plus, ceux-là ne demandent pas mieux que d'émigrer
le moins loin possible, de s'arrêter chez nous et d'y séjourner,
s'ils le peuvent, ne semblant s'avancer qu'à regret vers le
midi et seulement à mesure que ces contrées deviennent inhabitables à cause du froid, ou, ce qui est plus exact, au fur
et à mesure de la congélation des eaux, car toute cette race
peut supporter les plus basses températures sans inconvénient.
De même, par contre, dès que le dégel est arrivé, et qu'un
vent plus tiède vient à souffler du sud, sans prendre garde à
l'époque où on se trouve, la plupart d'entre eux ont hâte de
regagner les régions du nord, quitte à revenir un peu plus
tard nous rendre visite encore le même hiver si des froids
nouveaux les y contraignent. Aussi, leurs allées et venues
du nord au sud, nous semblent-elles un présage de froid ou
de chaleur. Comme, en effet, la zone de froid gagne d'habitude de proche en proche, et qu'ils ont tout intérêt à la devancer de la puissance de leurs ailes, on aperçoit d'ordinaire
leurs avant-gardes avant que le froid ne soit devenu rigoureux. Quant au temps doux, c'est à tort qu'on se figure cette
fois qu'ils l'annoncent. Ils le constatent seulement, puisqu'ils
ne remontent vers le nord que lorsque le dégel est déjà arrivé
dans le pays qu'ils traversent.
Les Canards de cette seconde catégorie de voyageurs, de
ces migrations d'hiver, sont d'ordinaire beaucoup moins distingués de formes, plus épais, de couleurs plus ternes, et
même un certain nombre sont plus ou moins chamarrés de
blanc et d'une multitude de nuances appartenant à nos
canards domestiques, mais étrangères à la livrée du véritable
tj'pe; preuve évidente de rapprochements, de mésalliances
avec les races domestiques, preuve également que leur patrie
est voisine des lieux habités par l'homme. Et chose remarquable, ce sont ces canards sauvages, si étrangement chamarrés (il en est même de tout blancs), connus de nos chasseurs d'Anjou sous le nom de Canes D'étangs, qui forment toujours l'arrière-garde de ces migrations d'hiver, car il faut des froids excessifs du nord pour que nous les voyions appa-
raître chez nous. Il est donc à supposer qu'avec le sang domestique qui, sans doute, coule plus ou moins dans les
veines de ces derniers, joint à leur corps plus pesant, à leurs
ailes moins robustes, il leur en coûte davantage pour prendre
le parti de s'expatrier et qu'ils ne peuvent se résoudre à cette
dernière extrémité qu'après que tous leurs congénères ont
déjà quitté le pays.
Le départ par les grands froids de ces Canards émigrant
des contrées septentrionales pour gagner les nôtres, et ensuite
celles du midi, s'il y a lieu, semble avoir la plus grande analogie avec celui de nos Canards de Maine-et-Loire, qui
n'abandonnent, eux aussi, leurs étangs que lorsqu'ils sont glacés,
pour gagner évidemment de même le sud. Les uns comme
les autres sont atteints fréquemment d'albinisme, semblent à
peu près sédentaires, en principe du moins, dans le pays qu'ils
habitent, ne le quittant que sous l'impulsion du froid, avec
cette diirérence seulement que, dans le nord, ils sont plus
souvent forcés de se résoudre à cette extrémité, puisque les
grands froids y sont plus rigoureux de même que plus fréquents. Et ainsi de suite les migrations doivent être de moins
en moins fréquentes en avançant vers les contrées méridionales oii, enlin, l'hiver finissant par ne plus jamais faire
sentir ses rigueurs, les canards qui les habitent semblent ne
plus devoir émigrer.
On peut donc induire de la différence de ces deux sortes de
migrations , que la première, celle d'automne , périodique
régulière (lin d'octobre) est formée de Canards venant directement de la mer libre. Sinon, pourquoi, parmi tous ces
Canards venant également du nord, les uns arrivent-ils à
époque fixe, a^ec une régularité parfaite, indépendante de la
température, tandis que les migrations des autres sont l'irrégularité même et toujours soumises à l'impulsion d'un motif
connu, le froid? Pourquoi cette apparente difierence de
mœurs et d'habitude chez des oiseaux de même espèce et
semblant venir des mêmes régions ?
Une seule explication est donc, en effet, possible, c'est la
mer libre (et cette mer n'aurait pas été découverte qu'il fau-
drait la supposer), c'est que les Canards de la migration d'octobre viennent de fuir la longue nuit de six mois, qui précisément à cette époque vient de voiler leur pays pour
jusqu'au retour du printemps. Quelle autre cause plausible
aurait pu forcer à émigrer à époque fixe cette race si volontiers sédentaire, alors que le froid n'existe pas encore, et que
leurs congénères n'émigreront que plus tard, peut-être même
]>as du tout, et seulement sous rimpulsion des froids les plus
vifs ?
D'ailleurs, si Kane a réellement vu cette multitude de Canards et autres oiseaux aquatiques dont il fait mention, il ne
peut en être autrement pour ces oiseaux ; car il ne leur reste
aucun choix ; il leur faut émigrer sous peine d'être enveloppés dans ces ténèbres. Et à quelles contrées iront-ils alors
demander l'hospitalité, ces oiseaux habitués à une lumière
sans fin, à cette longue journée d'une demi-année et à un
soleil si chaud qu'il est capable, dit-on, de fondre le goudron? Ce ne peut être aux plus rapprochées, plus ou moins
glacées, privées presque de soleil pendant l'hiver, et par là
même si différentes de leur pays l'été. Ce ne serait d'ailleurs
qu'une installation désagréable et précaire, puisqu'il faudrait
émigrer. de nouveau d'un instant à l'autre aux premiers froids
plus rigoureux.
N'est-il donc pas supposable, au contraire, qu'obligés de
quitter leur pays pour une période longue et fixe, ils choisissent une contrée d'où ils ne risquent pas d'être dérangés par
le froid, presque aussitôt arrivés, et oi^i ils retrouvent, sinon
une journée de six mois, au moins de longs jours, le soleil,
et un climat, malgré sa situation si différente, devant présenter une certaine analogie avec leur précédent, l'été. Mais
pour rencontrer ce pays sans hiver, il faudra entreprendre un
long voyage, s'installer sans doute, jusque dans l'Afrique centrale, ce qui, d'ailleurs, n'est pas fait pour les effrayer avec
la puissance de leurs ailes, leurs savantes combinaisons de
route fen ligne, en angle, où chaque membre de la troupe
vient se reléguer pour fendre l'air) et le soin qu'ils ont de
profiter du vent pour les aider dans leur marche vers le sud.
Tandis que les autres Canards du nord, mais dont la patrie
est en deçà de la région des nuits d'hiver perpétuelles, et
qui par là même n'ont d'autre cause de migration que des
froids momentanés, s'écartent le moins possible, et seulement
vers la limite des fortes gelées afin de pouvoir rentrer chez
eux dès la période de froid passée ; temps toujours relativement court et pouvant prendre fin à chaque instant. De plus,
liabitués à habiter les pays froids ou tempérés, ils ne ressentent pas le besoin d'émigrer dans des pays différents des leurs.
Ainsi plusieurs raisons semblent donc confirmer la théorie,
que la première migration, celle d'octobre, nous vient des
régions entrevues, mais encore inconnues et inexplorées, du
pôle. Ces raisons sont : l'instinct assez volontiers sédentaire
des Canards qui ne les porte pas à se déplacer aussi loin sans
motif; le lieu même où il est présumable qu'ils séjournent
l'hiver; leur façon d'émigrer si différente de celle des autres
Canards du nord qui ne le font que sous l'impulsion de la
température la plus rigoureuse, tandis qu'eux nous arrivent
avant que les froids sérieux aient envahi les régions du nord;
les multitudes de Canards vus sur la mer libre qui doivent
évidemment émigrer quelque part, quand celle-ci est couverte de ténèbres ; l'époque où ils arrivent qui est précisément celle où la nuit polaire commence ; enfin la pureté du
plumage des cols-verts de cette première migration, semblant
évidemment prouver qu'ils viennent de contrées où l'homme
n'habite pas, puisque partout ailleurs, les mélanges avec les
Faces domestiques influent plus ou moins sur leur coloration.
Fin de citation.
III Conclusion.
Bien que cette affaire de canards en vadrouille, combinée avec l'arrivée de la nuit polaire, soit compliquée à saisir, comme on le voit pour certaines espèces, il est fait ici, encore longuement appel, à cette notion de
mer libre du Pôle Nord, que
d'aucun ont voulu vite oubliée: Voir notre article :
Recherchemerlibre.html. Il ne vous reste donc qu'à en tirer, dès maintenant, les conclusions qui s'imposent...
Article mis en page le 20/06/2010 .
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